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Les effets des cendres et aérosols volcaniques sur le trafic aérien

Les cendres dans les panaches volcaniques

Les ejecta solides d’une éruption volcaniques explosives ont des tailles très variées, depuis des particules très fines (<5 microns) jusqu’à des blocs plurimétriques, l’ensemble étant nommé tephra. Le terme de "cendres volcaniques" se réfère aux petites particules de roches (moins de 2 mm) pulvérisées et éjectées dans l'atmosphère lors des éruptions volcaniques, et n’ont donc rien à voir avec des cendres de combustion. Dans le cas d’éruptions fortement explosives, les cendres volcaniques sont propulsées jusqu'à des dizaines de kilomètres de hauteur. La taille moyenne des particules dans un panache de cendre volcanique diminue avec le temps en raison de la sédimentation des plus grosses particules. Les particules supérieures à quelques dizaines de microns ont un temps de résidence de quelques heures. Les particules les plus fines, de quelques microns à quelques dizaines de microns, peuvent persister dans l'atmosphère pendant plusieurs jours. Les nuages de cendres dérivent en fonction des vents troposphériques ou stratosphériques et sont transportés sur de très longues distances loin de l’évent volcanique. Ces nuages de cendres susceptibles d’être rencontrés par les avions sont constitués des particules les plus fines (<100 microns). En pilotage de nuit, les nuages de cendre ne sont pas visibles par les pilotes, et n’apparaissent pas différemment des nuages d’hydrométéores aux radars à bord des avions. Même en vol de jour, les nuages de cendres peuvent ne pas être identifiés en raison de leur mélange avec la vapeur d'eau ou de leur trop faible coloration. La concentration en cendres en fonction de la distance dépend de la hauteur de la colonne de cendres, des conditions météorologiques (vitesse des vents, cisaillement en fonction l’altitude notamment pour les vents stratosphériques) et des changements de température.
Les interactions complexes entre les nuages volcaniques et l'atmosphère sont continuellement en cours d’investigation. Par exemple, la hauteur à laquelle un panache volcanique peut monter est énormément influencée par les propriétés atmosphériques (instabilité convective, cisaillement par le vent, hauteur de la tropopause). Un panache éruptif dans une atmosphère tropicale instable, par exemple, peut pourrait potentiellement monter bien au-dessus des altitudes de croisière, mais la même éruption durant un hiver polaire pourrait ne s’élever que de quelques kilomètres. Un nuage volcanique riche en eau/glace pourrait contenir beaucoup moins de cendres qu'un nuage volcanique plus sec en raison de l’agrégation des particules, mais le nuage pourrait être beaucoup plus difficile à détecter comme étant volcanique à cause de la présence de la glace.
Les propriétés des nuages de cendres comme la hauteur du panache, la concentration et la distribution en 3 dimensions des cendres sont suivies et étudiées par plusieurs techniques de télédétection sol ou satellite, parfois non-conventionnelles et en cours de développement. La prévision des trajectoires des nuages de cendre a requis le développement de modèles de transport et de dispersion des cendres volcaniques qui puissent calculer le cheminement d’un nuage de cendre à l'échelle d'un continent ou d’un hémisphère. Les paramètres volcanologiques tels que la hauteur du panache, le débit éruptif, la durée de l'éruption, la distribution des cendres avec l'altitude et la distribution des tailles des particules sont essentiels en temps réel pendant un événement pour contraindre ces modèles, souvent avec des observations limitées. L’amélioration des prévisions des trajectoires des nuages de cendre et des retombées contribuera à une meilleure évaluation des menaces pour l’aviation et pour la santé publique et la qualité de l'air.

Impact des cendres volcaniques sur les avions :

VOIR LES EFFETS SUR UN AVION MILITAIRE FINLANDAIS (15 avril 2010)

Durant les 30 dernières années, plus de 100 avions ont accidentellement traversé des nuages de cendres volcaniques de volcans en éruption. De telles circonstances ont causé des millions de dollars dans des dégâts aux avions et ont mis en danger les vies de dizaines de milliers de passagers. L’effet des nuages de cendres n’est pas juste local mais peut occasionner des perturbations sur plusieurs milliers de kilomètres, engendrant des coûts économiques rapidement très élevés, à l’instar de l’éruption du volcan EyjafjallajöKull en Islande. De la cendre volcanique croise les couloirs aériens à des altitudes de plus de 9 km environ 20 jours par an dans le monde. Les cendres volcaniques peuvent non seulement perturber les communautés locales, perturber les transports au sol, détruire les cultures, bloquer les réseaux d’eau, mais aussi endommager sévèrement les turbines des avions, abraser les surfaces externes, boucher les filtres à air, et provoquer la fermeture des grandes structures aéroportuaires. Les cendres, principalement composée de silicates fondant autour de 1100°C, ont tendance à se colmater sur les hélices et les lames des turbines, dans les parties chaudes des moteurs, opérant à 1400°C en propulsion normale. La formation d’une pellicule de verre sur toutes les surfaces internes des réacteurs occasionnent une perte de puissance quasi immédiate voire une panne, parfois simultanée, des moteurs. Dans le plus sérieux incident, celui d’un Boeing 747 de la British Airlines ayant traversé le nuage de cendres du Galunggung au dessus de l’Indonésie en 1982, l’ensemble des quatre moteurs a calé, mais, heureusement, le pilote a pu faire redémarrer deux des moteurs une fois que l'avion a quitté la zone contaminée par les cendres (après une chute de plusieurs milliers de mètres). Après bien d’autres incidents reportés, les éruptions récentes du Volcan Chaiten au Chili, en 2008, ont également causé cinq incidents d'avion, dont l’un ayant abouti au remplacement des moteurs, et aussi provoqué des perturbations significatives. Les trajectoires des panaches de cendre volcanique peuvent s'étendre sur des milliers de kilomètres et des études ont montré que quelques nuages volcaniques ont fait un tour complet autour de la Terre. Ceci est d'une importance très significative pour l'aviation dans le monde entier. En effet, on sait maintenant que des nuages volcaniques vieux de plusieurs jours ont causé des dégâts (mineurs) à plusieurs avions. Par exemple, fin 2002, une abrasion mineure et le blocage d’un tube Pitot a été provoquée sur un avion au dessus de la Papouasie Nouvelle Guinée par le nuage volcanique d'une éruption sud-américaine 20 jours plus tôt. Au-delà de leur potentiel pour provoquer un accident majeur lié à des pannes de moteur, les aérosols liquides ou solides peuvent représenter une menace considérable pour d'autres raisons. Les cendres, même très fines, sont très dures (5-7 sur l’échelle de dureté de Mohs) et extrêmement abrasives (elles sont d’ailleurs utilisées à cet effet dans certaines applications) et engendrent une abrasion rapide des surfaces externes des avions. L'abrasion des fenêtres du cockpit peut mener à la réduction ou la perte de la visibilité des pilotes. Comme la cendre volcanique est généralement trop fine pour être bloquée par les systèmes de filtration normaux, il peut lourdement contaminer le système de refroidissement, aussi bien que des unités électriques et avioniques, rendant le contrôle de l'avion très délicat. Plus la proportion de verre volcanique non altéré est grande dans les particules et plus celles-ci sont finement fragmentées et vésiculées, plus elles seront aptes à fondre rapidement dans les moteurs des avions. En revanche, des cendres riches en cristaux auront un pouvoir abrasif plus important.

Les effets des gaz et condensats

En plus des cendres, les panaches volcaniques contiennent de nombreuses espèces gazeuses. Malgré des proportions très variables, les gaz prédominants restent la vapeur d’eau, le dioxyde de soufre, et le chlore, avec, en moindre quantité, des sulfates d’hydrogène et des oxydes d’azote. Sous leur forme gazeuse, on ne connaît pas à ces constituants d’effet dangereux immédiat pour les avions. En revanche, l’oxydation et l’hydratation du SO2 forment des gouttelettes d’acide sulfurique (H2SO4). Ce mélange de condensats acides avec les cendres est fortement corrosif et peut endommager les réacteurs, les pare-brises et les surfaces externes ainsi que des parties internes des réacteurs, occasionnant des coûts de maintenance et réparation (peinture, vitres, appareils électroniques, réacteurs) très importants même pour des avions volant dans des nuages faiblement concentrés en aérosols volcaniques. Plusieurs exemples de pluies acides issues de colonne de cendres, comme au Sakurajima (Japon) ont montré des pH<1. Les gaz et aérosols acides mêlés aux cendres présentent l’avantage d’être détectable par satellite (voir les images issues des données MSG obtenues par le service d’Observation HotVolc au Laboratoire Magmas et Volcans).

Les effets de la charge électrique des panaches de cendres

Les éclairs sont fréquemment observés dans les panaches de cendres concentrés proche de la source, indiquant qu’ils sont fortement chargés en électricité. Même pour les nuages de cendres distaux, plus dilués, les décharges d’électricité statique révélées par les feux de St. Elmo sur les surfaces externes des avions, ainsi que le rougeoiement à l’intérieur des réacteurs, sont l’un des moyens de savoir s’ils sont entrés en contact avec des cendres volcaniques. La charge en électricité statique autour d’un avion peut aussi créer un effet « cocon » qui peut provoquer des détériorations, voire même la perte complète, des communications VHF ou HF avec les stations au sol. Une incertitude existe sur l’origine de ces charges électriques, qui pourraient être acquises lors de la fragmentation du magma ou ensuite lors des collisions entre particules dans la colonne de cendres. Les champs électriques dans une colonne ou un nuage de cendres atteignent fréquemment ?3 kv/m et peuvent monter jusqu’à 10 kv/m.

Quelques exemples d’incidents aériens liés aux panaches volcaniques

Mt. St. Helens, USA, 1980 (un 727 et un DC-8)
Galunggung, Indonésie, 1982. Deux 747 ont traversé les cendres de cette éruption ; le premier a perdu la puissance des 4 réacteurs, et a chuté de 11000 à 3800m avant de pouvoir les redémarrer.
Mt. Redoubt, USA, 1989. Les réacteurs d’un 747-400 ont ingéré des cendres de l’éruption et se sont enflammés avant de pouvoir être redémarrés pour un atterrissage à Anchorage.
Mt. Pinatubo, Philippines, 1991. Plus de 20 incidents aériens ont été rapports suite aux emissions de la plus grande éruption des 50 dernières années.
Mt. Popocatepetl (5424 m), Mexique, 1997-1998. Plusieurs vols ont été affectés.

Les efforts pour diminuer les risques

Ces incidents ont incité le développement d'efforts coopératifs de la part de l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale (ICAO) et la communauté volcanologique pour élaborer des protocoles de communication, fournir des notifications rapides en cas d'activité éruptive, surveiller et prévoir les trajectoires des nuages de cendres pour qu'ils puissent être évités par les avions. Prévoir la trajectoire des nuages de cendres 24h à l’avance est cruciale pour la sécurité aérienne, la notification des premières émissions de cendres devant être réalisée idéalement dans les 5 minutes qui suivent.
Neuf VAACS (Centres consultatifs pour les cendres volcaniques), dont celui de Toulouse (http://www.meteo.fr/vaac/) ont été créés à travers le monde par l'Organisation de l'aviation civile internationale pour fournir leur expertise à l'aviation civile en cas d’éruption volcanique significative. Ils sont l’un des piliers essentiels de l'IAVW (Surveillance des volcans et des voies aériennes internationales), avec les Observatoires volcanologiques, les organismes de prévision météorologique de chaque pays et les rapports des pilotes de ligne et des opérateurs aériens.

Les coûts des dommages et perturbations

En dehors de toute consideration de sécurité, les cendres volcaniques ont engendré de nombreux dommages aux avions dont les coûts dépasseraient largement 250 millions de dollars depuis 1982. Rien que l’indicent de vol KLM en 1989 a coûté 80 millions de dollars. Les coûts économiques pour les compagnies aériennes, en raison des annulations de vol, des retards, des dédommagements aux passagers etc., peuvent être astronomiques comme l’ont démontré les conséquences de l’éruption du volcan Islandais Eyjafjallajökull en 2010, avec des estimations de 1 milliard de dollars. Ainsi donc, les compagnies aériennes n’hésitent pas à dérouter leurs avions susceptibles d’entrer en contact avec des cendres volcaniques malgré le surcoût.

Liens utiles:

VAAC Toulouse : http://www.meteo.fr/vaac/
Aero 69 : http://www.boeing.com/commercial/aeromagazine/aero_09/volcanic_story.html
ICAO Manual : Volcanic Ash, radioactive material and Toxic Chemical Clouds, doc 9671
Casadevall, T. J., ed. 1994. The First International Symposium on Volcanic Ash and Aviation Safety: Proceedings Volume: U.S. Geological Survey Bulletin 2047.
Volcanic clouds website MTU : http://www.geo.mtu.edu/volcanoes/vc_web/

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